L’époque moderne (1573-1868)
La période d’Azuchi-Momoyama (1573-1603)
Tokugawa Ieyasu Tokugawa Ieyasu, représenté ici au centre prend le titre de shogun (chef de guerre), trois ans après s'être rendu maître du Japon. Ayant su nouer des alliances et vaincre les chefs de clans qui s'opposaient à lui, il met un terme aux guerres féodales qui empêchaient d'unifier le Japon. Il ouvre ainsi l'ère à une nouvelle organisation shogunale marquée par une paix durable et la remise en ordre du royaume.
Débuts de l'unification du Japon par Oda Nobunaga Au xvie siècle, alors que le Japon est déchiré par les guerres de daimyos, le seigneur Oda Nobunaga, de la province d'Owari, soumet progressivement les territoires du centre de l'île. Aidé dans son entreprise par le chef de guerre Tokugawa Ieyasu, Oda Nobunaga unifie la moitié des provinces japonaises ; son lieutenant Toyotomi Hideyoshi achève l'unification après sa mort.
La période d’Azuchi-Momoyama, période de transition entre le shogunat des Ashikaga et celui des Tokugawa, marque la réunification progressive du Japon, qui a lieu en trois étapes. Oda Nobunaga, daimyo de la région de Nagoya, parvient à chasser de la capitale le dernier shogun Ashikaga. Il installe alors son quartier général à Azuchi, d’où il tente d’unifier le pays, s’emparant de plus de la moitié des plaines de l’est du pays et parvenant à briser la résistance des monastères.
Lorsque d’Oda Nobunaga est trahi et contraint au suicide par la traîtrise de l’un de ses vassaux, c’est Toyotomi Hideyoshi, son plus fidèle lieutenant et l’un de ses meilleurs soldats, qui lui succède. Ce dernier se fait construire un château à Osaka, obtient de la cour d’importantes charges — exceptée celle de shogun, n’étant pas un descendant Minamoto — et engage dès 1586 d’importantes réformes politiques et économiques destinées à asseoir son pouvoir. En 1595, avec l’aide d’un puissant vassal, Tokugawa Ieyasu, il parvient à unifier l’ensemble du territoire japonais, y compris Shikoku, Kyushu et les plaines du Nord-Est. Sa santé mentale décline cependant et, dès 1592, il entreprend de lancer ses troupes à la conquête de Cathay. La tentative est renouvelée en 1597, mais Toyotomi Hideyoshi meurt en 1598 au cours de la seconde campagne, ne laissant derrière lui qu’un fils de cinq ans.
Les vassaux d’Hideyoshi rompent rapidement le serment d’allégeance qui les lie à son jeune fils et commencent à se quereller au sujet de la succession ; néanmoins, Tokugawa Ieyasu écrase les prétendants en 1600 à la bataille de Sekigahara. Contrairement à son prédécesseur, le nouveau maître du Japon a songé à s’inventer une généalogie fictive lui permettant de s’établir une ascendance Minamoto ; aussi la Cour peut-elle lui octroyer la charge de shogun en 1603, fondant ainsi le shogunat des Tokugawa, et ouvrant une période de stabilité politique qui dure jusqu’à la fin du 19e siècle, la période d’Edo.
La période d’Edo (1603-1868)
Une nouvelle organisation politique et sociale
Désireux de ne pas reproduire les erreurs de ses prédécesseurs et d’assurer sans trop de difficultés sa succession, Ieyasu abdique dès 1605 en faveur de son fils, puis se débarrasse en 1615 des derniers descendants d’Hideyoshi en s’emparant de la forteresse d’Osaka. Il installe son gouvernement militaire, ou bakufu, à Edo (actuelle Tokyo) — qui devient, en peu de temps, la plus grande et la plus riche des villes de Nippon —, puis entreprend un grand nombre de réformes politiques, sociales et fiscales destinées à assurer au gouvernement shogunal le contrôle absolu de la population. Lorsque Ieyasu meurt en 1616, il laisse une œuvre considérable et destinée à durer : Nippon, unifié, possède désormais un gouvernement stable.
Le personnage central de ce gouvernement est le shogun, de loin le plus puissant et le plus riche de tous les daimyos. Il dispose en permanence d’une armée de 80 000 hommes et contrôle directement les grandes villes et les ports, ainsi que tous les grands axes routiers et les mines. Le shogun gouverne seul, avec l’aide d’un conseil composé de ministres d’État (rochu) et d’un conseil d’intendants (wakashidori). Il est également assisté par les préfets d’Edo, les intendants des finances, les commissaires aux affaires religieuses et de nombreux inspecteurs. Au début de la période d’Edo, il y a environ 270 daimyo, qui se répartissent en trois catégories : les shinban daimyo, collatéraux et enfants de Tokugawa Ieyasu, les fudai daimyo, vassaux fidèles ralliés avant 1600, et les tozama daimyo, vassaux ralliés ou vaincus après 1600, souvent puissants et dangereux.
La société de la période d’Edo est divisée en catégories sociales, entre lesquelles la mobilité est en principe bloquée. On distingue ainsi les guerriers, les paysans, les artisans et les commerçants, puis, dans un autre registre, les nobles de cour, les moines bouddhistes et les desservants shinto et, enfin, en dehors de la société, les parias (eta et hinin). Le shogunat édicte, entre 1615 et 1635, un grand nombre de décrets destinés à fixer la population et à limiter au maximum la mobilité sociale. Chaque daimyo conserve dans son fief l’autorité suprême, mais doit faire serment d’allégeance aux Tokugawa, laisser sa famille en otage à Edo, et venir personnellement rendre ses devoirs au shogun une fois tous les deux ans.
La fermeture du pays
Une autre conséquence de la domination des Tokugawa est la fermeture de Nippon à toute influence extérieure. Tous les étrangers sont bientôt expulsés, tandis que seuls les hommes d’Estalie et ceux de l’Empire, cantonnés dans l’île artificielle de Deshima (dans le port de Nagasaki), conservent le droit de commercer avec le pays une fois par an.
Au cours des deux siècles suivants, les formes de la féodalité japonaise demeurent inchangées. Le Bushido, code des guerriers féodaux, devient le modèle de conduite des guerriers, qu’ils soient daimyo, samouraï ou ryôshi. Du fait de la paix durable, qui laisse inactifs un très grand nombre de guerriers, pour la plupart instruits, la culture Edo — qui, contrairement aux apparences, n’a jamais été ni complètement fermée aux influences extérieures, ni vraiment repliée sur elle-même — est particulièrement dynamique sur le plan culturel. Le développement rapide des écoles et de l’instruction permet l’apparition, aux côtés des classiques études chinoises, des « études nationales » (kokugaku), ainsi que des « études impériales » (rangaku). Le théâtre kabuki, l’art de Honnami Koetsu et l’école picturale Ukiyo-e, ainsi que les romans de Ihara Saikaku et la poésie de Basho, datent de cette période. Le néo-confucianisme devient l’idéologie officielle du gouvernement dès le quatrième shogun, qui cherche à pacifier les lois du pays et surtout à combattre la crise économique et financière naissante — qui ne cesse d’ailleurs de s’aggraver tout au long de la période d’Edo.
L’ère Meiji (1868 à nos jours)
L’unification définitive du pays
Les forces provenant des fiefs de Satsuma, de Choshu et de Tosa, qui constituent désormais l’armée impériale, défont les dernières troupes des shoguns en 1868. La plupart des fiefs restent en dehors du conflit, attendant son issue. Cette guerre, dite Boshin, se termine rapidement par la capitulation des forces shogunales à Edo. Le jeune empereur Mutsuhito choisit le nom de Meiji (« gouvernement éclairé ») pour désigner son règne. Ce nom devient également son nom posthume d’empereur. Autour de lui, évoluent Okubo Toshimichi, Saigo Takamori et Kido Takayoshi, guerriers issus des clans Choshu et Satsuma, qui parviennent à monopoliser les postes ministériels et sont les artisans des réformes. La capitale impériale est transférée à Edo, rebaptisée Tokyo (« capitale de l’Est »). En 1869, les seigneurs des grands clans de Choshu, Hizen, Satsuma et Tosa remettent leurs fiefs entre les mains de l’empereur ; la renonciation des autres clans suit bientôt et, en 1871, un décret impérial proclame un état fédéral sous la gouvernance de l’empereur. La réalité du pouvoir est entre les mains des samouraï des clans Satsuma et Choshu. Issus des rangs inférieurs de la caste des samouraïs, ces hommes jeunes — ils ont tous entre 27 et 41 ans en 1868 — fournissent l’essentiel des cadres de l’Empire jusqu’à nos jours.
Une société nouvelle
En à peine trente ans, s’appuyant sur une élite intellectuelle ouverte sur l’Occident et aussi bien formée aux sciences venues d’Occident qu’aux disciplines traditionnelles, Nippon redevient une puissance.
En 1876, la caste des samouraïs perd par décret son droit de port des deux sabres, ils sont canonnés dans l’administration policière, l’armée – en tant qu’instructeur et combattants d’élite – et en tant qu’expert dans le maniement du sabre affecté à un dojo. Ce n’est cependant pas sans un long et tragique affrontement entre l’armée impériale et les samouraïs ; ceux-ci sont finalement vaincus à Satsuma en 1877. Saigo Takamori, qui a pris la tête de la rébellion après avoir soutenu la restauration de Meiji, se donne la mort. Cette mutation brutale, imposée par les classes supérieures — l’oligarchie des clans Choshu et Satsuma —, n’est pas le résultat d’une exigence politique populaire. Les paysans, malgré la possibilité qui leur est donnée de posséder les terres (1868), continuent à supporter la plus grande partie du fardeau des impôts et les révoltes agraires et ouvrières se poursuivent.
Une politique extérieure agressive
Dès 1879, Nippon a pris possession des îles Ryukyu, sous protectorat depuis 1609. La conquête du Koryo est l’étape suivante de son expansion. La guerre sino-japonaise (1894-1895) voit triompher l’armée japonaise. Aux termes du traité de Shimonoseki (1895), Cathay cède au Japon Formose (Taïwan), Penghu, et lui verse une indemnité financière considérable. Le traité accorde également au Japon la péninsule de Liaodong (sud de la Mandchourie).
Depuis les attaques du Chaos se sont faites de plus en plus puissante – un paroxysme est atteint en 1945 (destruction d’Hiroshima et de Nagasaki) – avant de décroître. Cependant les nouvelles vagues d’assaut sont de plus en plus rapprochées et violentes et Nippon ne tient que grâce à la ferme détermination de ses soldats.
1. Vlad II le 07-02-2009 à 20:34:16
Quand je te disais qu'un historique aiderait à mieux comprendre l'armée, je ne pensais pas que tu allais te montrer aussi prolixe! j'ai même du mal à croire que tu l'as fait tout seul! bravo pour ce remarquable effort et bon courage pour la suite.
Vlad
édité le 07-02-2009 à 21:38:29
Le Moyen Âge (1185-1573)
La période de Kamakura (1185-1333)
Après la défaite des Taira, Minamoto no Yoritomo s’arroge l’essentiel du pouvoir. Il élimine son frère puis s’engage dans la pacification du pays, terminée en 1189. À Kamakura, loin de la Cour impériale et de ses splendeurs, s’élève désormais un nouveau type de pouvoir, un pouvoir guerrier temporel, qui certes tire sa légitimité de l’investissement impérial dont il ne peut se passer, mais qui, de fait, gouverne dès lors le pays. C’est le début de la période de Kamakura.
En 1192, Minamoto no Yoritomo est nommé par l’empereur Seiitai shogun, (littéralement « général chargé de la lutte contre les barbares », abrégé en shogun), inaugurant ainsi le bakufu (littéralement, « gouvernement de la tente ») de Kamakura, gouvernement militaire d’un genre nouveau, dont naît alors une forme de féodalité qui perdure, sous différentes formes, jusqu’à la fin du 19e siècle.
Le règne des Minamoto est de courte durée. Dès 1219, faute d’héritiers Minamoto adultes, les Hojo s’arrogent le titre de régent héréditaire (shikken), qu’ils conservent jusqu’en 1333. Les « troubles de l’ère Jokyu » au cours desquels l’empereur retiré Go-Toba tente de renverser le shogunat, n’empêchent pas les Hojo d’établir fermement leur pouvoir. En 1232 est ainsi édicté un nouveau code civil et pénal en 51 articles, resté en vigueur jusqu’à la fin du xixe siècle.
La Nippon guerrière est certes une Nippon plus rude et plus violente que celle de l’époque précédente, mais il est cependant au cœur d’une civilisation brillante et novatrice. Sur le plan littéraire, la lutte entre les Taira et les Minamoto, ainsi que la chute tragique des premiers, inspire une nouvelle écriture, aux accents épiques, dont le chef-d’œuvre est sans doute le Dit des Heike (Heike monogatari, v. 1220). La poésie de cour, toujours vivante, est marquée par la compilation de nouvelles anthologies, qui consacrent des poètes tels que l’empereur Go-Toba lui-même, ou Fujiwara no Sadaie.
L’époque de Kamakura est également une période de grand dynamisme religieux. De nombreuses sectes apparaissent, supplantant rapidement les écoles tendai et shingon de l’époque précédente, proposant une foi et une pratique moins aristocratique, plus accessible aux laïcs. Parmi ces nouveaux courants, l’amidisme — dont la pensée est en particulier développée par les moines Genku et Shinran — promet à ses fidèles la renaissance en Terre Pure à la seule condition de croire en la puissance d’Amida ; il se répand très rapidement parmi les couches populaires. À la même époque, le bouddhisme zen est adopté par de nombreux guerriers, qui puisent dans cette doctrine une philosophie et une foi capables de les aider sur le champ de bataille. Deux nouvelles écoles zen sont alors créées, la secte rinzai, fondée par le moine Eisai, et la secte soto, fondée par Dogen. En 1253, le moine Nichiren fonde une autre secte, appelée secte du Lotus ou secte nichiren (Nichiren-shu), dont la puissance politique ne cesse de croître.
Pendant plus de cent ans, les Hojo se maintiennent au pouvoir. Leurs officiers et leurs gouverneurs de provinces acquièrent de l’influence sur leurs terres et forment à leur tour de nouveaux clans militaires. En 1274 puis en 1281, les hordes du Chaos, qui contrôle déjà Cathay, essaient de soumettre Nippon. Les chaotiques sont repoussés de justesse, en partie grâce au typhon resté célèbre sous le nom de kamikaze, « vent des Dieux ».
La restauration de Kenmu et la période de Nanbokucho (1333-1392)
Facilement repoussées, les invasions chaotiques laissent cependant le régime des Hojo épuisé et très appauvri. L’empereur Go-Daigo, intronisé en 1318 puis exilé pour avoir tenté de s’opposer au shogunat, envisage de profiter de cette faiblesse pour rassembler autour de lui suffisamment de partisans pour renverser le pouvoir en place. Il reçoit le soutien de Ashikaga Takauji (1305-1358), seigneur du clan Ashikaga et chef militaire chargé par les Hojo de maintenir l’ordre : le shogunat est renversé et le pouvoir revient à l’empereur Go-Daigo. Cette période, appelée restauration de Kenmu, ne dure qu’à peine trois ans (1333-1336).
Mécontent du peu de reconnaissance que Go-Daigo lui témoigne, Ashikaga Takauji le chasse de la capitale en 1336, intronisant un nouvel empereur, dont il reçoit la charge de shogun en 1338. Go-Daigo part se réfugier dans les montagnes au sud de Nara et y fonde une seconde cour impériale. Commence alors une longue période de guerre civile que les historiens appellent période de Nanbokucho (littéralement, « époque des cours du sud et du nord »), qui ne s’achève qu’en 1392 lorsque le shogun Yoshimitsu obtient le retour de la cour du sud et la réconciliation des deux branches impériales.
La période de Muromachi (1338-1573)
Le gouvernement des Ashikaga
Désormais shogun, fondateur de la lignée des Ashikaga, Takauji entreprend de renforcer son pouvoir dès les premières années de son règne. La tâche n’est pas aisée, puisque que les guerres civiles ne cessent de se succéder. Il faut attendre le gouvernement de son fils Yoshiakira (shogun de 1358 à 1367) et surtout son petit-fils Yoshimitsu (shogun de 1358 à 1394) pour que parvienne à s’établir un fragile équilibre. Un commerce officiel est notamment entrepris avec Cathay, permettant un essor économique important et le développement d’une bourgeoisie urbaine. La stabilité n’est cependant que de courte durée. Dès le début du 15e siècle, le gouvernement central perd de son pourvoir, au profit des chefs militaires installés dans les provinces, les shugo daimyo. La majeure partie du pays échappe ainsi au contrôle shogunal, tandis que les campagnes sont secouées par de fréquentes révoltes paysannes.
L’essor économique et culturel
Malgré la fréquence et la violence des troubles politiques et sociaux, le shogunat des Ashikaga est une période d’essor culturel sans précédent. Ashikaga Yoshimitsu, le troisième shogun, se fait protecteur des arts et des lettres — un art largement inspiré de l’esthétique de la Cathay des Ming puis des Song, importé à Nippon par les moines zen et les penseurs confucianistes, dont l’influence est alors en plein développement — notamment représenté par Zeami pour le théâtre nô, Sen no Rikyu pour la cérémonie du thé, Sesshu, etc. De nouvelles influences pénètrent également, grâce à l’arrivée des Hommes Estalie qui débarquent à Kagoshima en 1543. Leurs canons sont vite copiés par les artisans locaux, transformant ainsi l’art de la guerre à Nippon.
Les « Provinces en guerre » ou période de Sengoku
Les troubles de l’ère Onin (1467-1477) marquent symboliquement l’entrée de Nippon dans la période dite des « Provinces en guerre » ou période de Sengoku, pendant laquelle les seigneurs provinciaux (daimyo), tentent d’étendre leur pouvoir sur leurs terres, avant d’entrer en guerre de manière quasi systématique contre leurs voisins. De cette anarchie, bientôt étendue à tout le territoire, émergent cependant certains seigneurs encore plus ambitieux, dont le but affirmé est l’unification politique de Nippon. Parmi ceux-là, on citera en particulier Takeda Shingen et son rival Uesugi Kenshin, mais aussi Oda Nobunaga et Tokugawa Ieyasu.
Nippon entre dans l’histoire entre le 5e siècle et le 7e siècle apr. Sigmar, lorsqu’il commence à utiliser le système d’écriture de son grand voisin Cathay pour son propre usage. Les premiers témoignages de l’histoire japonaise conservés sont le Kojiki (« Récit des faits anciens », 712) et le Nihon Shoki (« Chroniques de Nippon », 720). Ces deux écrits historiques relatent les légendes liées à la fondation mythique du Japon par l’empereur Jinmu (fixée en l’an 660 av. Sigmar), descendant de la déesse du soleil Amaterasu Omikami (voir mythologie japonaise), ainsi que les événements les plus récents de l’histoire politique — notamment la constitution du pays en temps qu’État autonome. Cependant, le peuple japonais apparaît déjà dans les annales chinoises, en tant que peuple barbare payant (ou non) un tribu à l’empereur chinois.
La période de Kofun (300-593)
La période de Kofun (littéralement « tertres anciens ») tire son nom des gigantesques tumulus servant de sépulture aux chefs les plus importants, qui apparaissent au début du 3e siècle et prennent, à partir du 4e siècle, des dimensions imposantes — témoignant sans doute de l’existence d’une classe dirigeante de plus en plus riche et puissante. Les kofun les plus caractéristiques de l’époque mesurent plus de deux cent mètres de longueur, sont en forme de « trou de serrure » et sont jalonnés de cylindres en terre cuite, les haniwa, surmontés de récipients à offrandes, puis de figurines représentant souvent des guerriers. On a retrouvé les tumulus les plus anciens dans le Kinai, au sud du bassin du Yamato. Ils se sont diffusés ensuite dans l’ouest (jusqu’à Kyushu) puis dans l’est (jusque dans le Kanto), témoignant sans doute de l’expansion progressive de l’influence du royaume du Yamato.
Les recoupements entre les découvertes archéologiques, les chroniques chinoises de la fin de la dynastie Han et les premières annales japonaises permettent d’accréditer la tradition qui veut qu’entre le 3e et le 5e siècle se soit formé, au sud de l’actuelle Kyoto, un premier État que les chroniques chinoises appellent « royaume du Yamato ». Il semblerait, en effet, qu’à peu près à cette époque, un groupe plus puissant que les autres parvienne à fédérer sous son autorité les petits royaumes de la plaine de l’actuelle Nara, peut-être avec l’aide d’immigrés venus du royaume coréen de Paekche. Dès la seconde moitié du 5e siècle, l’influence de la cour du Yamato s’étend du sud de Kyushu à l’est du Kanto — comme en témoignent de récentes découvertes archéologiques —, tandis que se mettent en place des relations diplomatiques officielles avec Cathay sous dominance Song. Ces contacts permettent, en particulier, l’introduction progressive de l’écriture, qui marque l’entrée de Nippon dans l’histoire.
La supériorité de la cour du Yamato résulte, en fait, essentiellement d’un jeu d’alliances entre le clan dirigeant et les grandes familles (uji), dont l’influence et la puissance ne cesse de croître, notamment à partir du vie siècle. La cour du Yamato préside à l’introduction du bouddhisme, que l’on situe en général en l’an 538, date à laquelle le roi de Paekche envoie à Nippon une statue et quelques textes bouddhiques. Cette culture s’enracine très fortement dans l’archipel et dès le 7e siècle, le bouddhisme devient la religion officielle de Nippon.
La période ancienne (593-1185)
La période d’Asuka (593-710)
La période d’Asuka, qui doit son nom à la principale résidence de la cour, débute avec l’accession au trône de l’impératrice Suiko (qui règne de 592 à 628), après l’assassinat de l’empereur Sushun par les Soga. Le neveu de l’impératrice, le prince Shotoku Taishi, prend l’initiative de réformes destinées à moderniser le pays. En 603, il fait promulguer la « Constitution en dix-sept articles », code législatif d’inspiration bouddhique et confucianiste, et crée une bureaucratie à la chinoise, fixant notamment les échelons de la hiérarchie des fonctionnaires. Les efforts déployés par Shotoku Taishi pour stimuler l’établissement du bouddhisme à travers le pays favorisent la propagation de la culture chinoise et la formation d’une élite sinisée.
Les réformes de Shotoku Taishi sont poursuivies par ses successeurs : le prince Naka no Oe, futur empereur Tenji, et son conseiller Nakatomi no Kamatari (614-669) — auquel est plus tard octroyé le nom familial de Fujiwara — parviennent en 645 à éliminer le clan Soga et promulguent la même année les premiers décrets de la réforme de l’ère Taika (645-649), dont l’objectif principal est de renforcer le pouvoir de la maison impériale et d’affaiblir les clans. L’administration du royaume se fait désormais selon le modèle chinois : le code de l’ère Taika est ainsi suivi par ceux de Kiyomihara, Taiho et Yoro, dont les mesures permettent la mise en place progressive de ce que les historiens appellent « l’État régi par les codes » (ritsuryo), très centralisé et dominé par une bureaucratie puissante et très hiérarchisée.
La période de Nara (710-784)
En 710, la cour rompt avec la tradition qui veut que l’empereur change de résidence à chaque nouveau règne, et fixe sa capitale à Heijo-kyo (actuelle Nara, qui donne d’ailleurs son nom à la période de Nara), nouvelle capitale conçue comme un centre et construite selon un plan en damier imité des capitales chinoises. La vie politique est rapidement dominée par les descendants de Nakatomi no Kamatari, les Fujiwara, qui encouragent la promotion du bouddhisme — comme en témoigne notamment l’édification du Grand Bouddha de Nara, achevé vers 752 —, et le dynamisme des relations diplomatiques nouées avec Cathay sous la domination de la dynastie Tang.
La population augmentant régulièrement, le pays manque rapidement de rizières à répartir selon le système mis en place par les réformes de l’ère Taika. Dès 723, un décret autorise ainsi ceux qui défrichent de nouvelles terres d’en jouir pendant trois générations. En 743, cette exception au système de répartition s’étend et permet notamment aux temples et aux grandes familles d’acquérir de vastes domaines sans limitation dans le temps.
C’est à cette époque que sont élaborées les deux premières histoires nationales, le Kojiki (712) et le Nihon Shoki (720), et qu’est compilée la première grande anthologie poétique, le Manyoshu (« Recueil des dix mille feuilles », v. 760), tandis que se développent un art et une architecture encore largement influencés par Cathay, mais dont certains traits originaux commencent à se dégager. Le développement des temples et du clergé bouddhiste (les six sectes de Nara) devenant une charge de plus en plus pesante pour les empereurs, Kanmu (qui règne de 781 à 806) cherche à se dégager de leur influence en transférant en 784 la capitale impériale à Nagaoka puis, dix ans plus tard, à Heian-kyo (actuelle Kyoto), capitale en titre jusqu’en 1868.
La période de Heian (794-1185)
Byodoin (Uji) Le Byodoin est l'un des rares exemples de l'architecture amidiste de l'époque Heian. Construit pour la famille Fujiwara Yorimichi, le pavillon du Phénix fut transformé en sanctuaire en 1053. Il est situé à Uji, près de Kyoto.
La période de Heian apporte à Nippon plus de 350 années de paix et de prospérité. À partir du 9e siècle, la cour parvient à étendre sa domination sur toutes les îles principales de Nippon, à l’exception d’Hokkaido et du nord d’Honshu, où des campagnes militaires sont régulièrement menées pour refouler les Aïnu.
Les Fujiwara
À partir de la seconde moitié du 9e siècle, le pouvoir temporel échappe progressivement à la famille impériale pour se concentrer entre les mains des Fujiwara, lesquels mettent en place une politique habile leur permettant de systématiquement s’arroger la charge de sessho (régent) ou de kanpaku (chancelier) d’un jeune empereur né d’une des demoiselles du clan. Ainsi, lorsque l’empereur Montoku meurt en 858, laissant le trône au jeune empereur Seiwa (alors âgé de huit ans), son grand-père Fujiwara no Yoshifusa prend le titre de régent, initiant une tradition guère contestée jusqu’à la fin du 10e siècle. Les Fujiwara accaparent dès lors la plupart des charges officielles, à la Cour comme dans l’administration ; ils s’imposent au sein de la famille impériale en mariant, génération après génération, leurs filles aux empereurs : ceux-ci sont encouragés à abdiquer en faveur de leurs successeurs, encore enfants et aussitôt placés sous la régence d’un Fujiwara. Le plus important des membres de la famille reste Fujiwara no Michinaga (966-1028), dont les cinq filles épousent des empereurs, ce qui lui permet de contrôler absolument la Cour entre 995 et 1028.
L’époque des Fujiwara est marquée par le développement d’une culture nationale dégagée de ses influences chinoises. Le temps de Fujiwara no Michinaga est également celui de l’apogée culturelle de la Cour de Heian, notamment sur le plan littéraire avec des femmes écrivains telles que Murasaki Shikibu, auteur du Dit du Genji (Genji monogatari, début 11e siècle) ou encore Sei Shonagon. Sur le plan politique et économique, l’autorité centrale s’affaiblit progressivement : les deux grandes sectes bouddhistes nées à cette époque, tendai et shingon, acquièrent des domaines immenses, tandis que les aristocrates provinciaux se taillent de grands fiefs, souvent exemptés de taxes, qu’ils administrent personnellement. Un seigneur du clan des Taira ose même se proclamer empereur en 940. Cet événement est révélateur de la tendance qui se dessine : les clans seigneuriaux, de plus en plus autonomes, commencent à organiser leurs provinces en véritables États et à se lancer dans des guerres de conquête.
La guerre des clans
Guerre civile entre Minamoto et Taira Au milieu du 12e siècle, la « révolte Heiji » permet au clan Taira de contrôler la Nippon impérialle. En 1180, alors que Taira no Kiyomori fait proclamer son fils empereur, les deux frères Yoritomo et Yoshitsune, du clan Minamoto, déclenchent une guerre contre cette usurpation. Au terme de cinq années de guerre civile, Yoritomo prend le titre de shogun et inaugure ainsi l'ère des shogunats.
L’hégémonie des Fujiwara prend fin en 1028, après la mort de Michinaga. Puis, au milieu du 11e siècle, la famille perd son monopole sur la régence : à la mort de l’empereur Go-Reizei en 1068, aucun Fujiwara n’est en âge de s’arroger ce rôle, et le trône impérial revient à l’empereur Go-Sanjo. Ce dernier n’hésite pas à marquer d’emblée son indépendance. Son fils, l’empereur Shirakawa (qui règne à partir de 1072) inaugure un nouveau mode de gouvernement, celui des « empereurs retirés » (insei) : il abdique en 1086 en faveur de son fils l’empereur Horikawa, dont il assure lui-même la régence.
Cependant, dans les provinces, commence à se développer un monde guerrier dont les ambitions sont assez éloignées des préoccupations des aristocrates de la Cour. Les samouraïs, au service de propriétaires terriens restés à la capitale dont ils administrent les terres, s’organisent en clans de plus en plus puissants. Les clans les plus importants sont alors les Taira, protégés par les empereurs retirés, qui acquièrent une renommée militaire et établissent leur pouvoir dans le sud-ouest du pays autour de la mer Intérieure, et les Minamoto, proches des Fujiwara, font de même dans les vastes plaines du Kanto.
Minamoto no Yoritomo C'est à ce seigneur de guerre du Japon du 12e siècle que l'on attribue la fondation du shogunat, système féodal qui perdure jusqu'à l'avènement de l'ère Meiji, en 1868. L'appellation de shogun, dont Minamoto se pare en 1192 - abréviation du titre de Seii-Taï-Shogun, signifiant « le chef de celui qui combat les barbares » - marque le début de l'ère de Kamakura. Loin de la cour impériale se développe un féodalisme local qui voit l'émergence d'un ordre nouveau marqué par l'apparition de la classe militaire des samouraïs.
En 1156, tandis que deux frères Fujiwara, Tadamichi et Yorinaga, se déchirent pour le pouvoir, un conflit de succession éclate après la mort de l’empereur retiré Toba, entre l’ancien l’empereur Sutoku (1119-1164) et le fils de Toba-tenno, le futur empereur Go-Shirakawa (1127-1192). Sutoku, Yorinaga et Minamoto no Tameyoshi s’allient alors contre Goshirakawa, Tadamichi et les guerriers Taira no Kiyomori et Minamoto no Yoshitomo, propre fils de Tameyoshi. Les batailles qui s’ensuivent, ou « troubles de l’ère Hogen », se soldent par l’exil de Sutoku et l’avènement de Yoshirakawa. Ce dernier, devenu empereur, néglige cependant de récompenser Yoshitomo à sa juste valeur, lequel fomente un coup d’État en 1159 (« troubles de l’ère Heiji »), rapidement écrasé par Kiyomori : Yoshitomo est éliminé, ainsi que la plupart des membres de sa famille, à l’exception de ses deux plus jeunes fils, Minamoto no Yoritomo et Minamoto no Yoshitsune.
Les Taira dominent désormais le pays, tandis que Kiyomori s’arroge les postes les plus élevés de la Cour. Calquant sa politique sur celle des Fujiwara, il distribue les emplois de la Cour aux membres de sa famille et marie sa fille à un prince impérial, dont le jeune fils Antoku devient empereur en 1180. La même année, Minamoto no Yoritomo, qui a établi son quartier général dans l’est du pays (à Kamakura), saisit le prétexte d’un soulèvement organisé par son cousin Yoshinaka pour de nouveau déclencher les hostilités. Cette première bataille est un échec, mais lorsque Yoshinaka décide d’attaquer la capitale impériale en 1183, Yoritomo a rassemblé suffisamment d’hommes pour que son armée, dirigée par son brillant frère cadet Minamoto no Yoshitsune, parvienne à porter secours à l’empereur retiré Go-Shirakawa. Les batailles se succèdent, repoussant les Taira vers l’ouest du Japon, jusqu’à la bataille décisive de Dan no Ura, qui marque symboliquement la fin de l’époque antique et le début du Moyen Âge.
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