« J'accuse le lieutenant-colonel de Paty de Clam d'avoir été l'ouvrier diabolique de l'erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d'avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.
J'accuse
le général Mercier de s'être rendu complice, tout au moins
par faiblesse d'esprit, d'une des plus grandes iniquités du siècle.
J'accuse le général Billot d'avoir eu entre les mains les
preuves certaines de l'innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de
s'être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un
but politique et pour sauver l'état-major compromis.
J'accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s'être rendus complices du même
crime, l'un sans doute par passion cléricale, l'autre peut-être par cet esprit
de corps qui fait des bureaux de la guerre l'arche sainte, inattaquable.
J'accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d'avoir fait une
enquête scélérate, j'entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité,
dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve
audace.
J'accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et
Couard, d'avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu'un
examen médical ne les déclare atteints d'une maladie de la vue et du jugement.
J'accuse les bureaux de la guerre d'avoir mené dans la presse, particulièrement
dans L'Éclair et dans L'Echo de Paris, une campagne abominable, pour égarer l'opinion et couvrir
leur faute.