« L'Europe est un État composé de plusieurs provinces. »
Montesquieu fut sûrement un des plus brillant esprits de son temps et la justesse de son propos marque encore aujourd'hui la pensée que nous pourrions avoir de notre société. Cette réflexion doit maintenant être la base d'une nouvelle avancée politique et constitutionnelle de l'Europe.
Ce référendum qui nous semble un rejet de la construction politique et économique la plus importante du dernier siècle, peut être soit l'annonce d'un nouveau départ soit la fin d'un rêve de puissance.
La fin annoncée de l'Europe économique.
La seule certitude actuelle que nous puissions retirer de cette consultation populaire, est le rejet de l'orthodoxie financière et de l'asservissement des peuples européens sur l'autel du libéralisme économique.
Pourquoi ce rejet ? Parce que l'Europe n'est pas fondé dans une logique de solidarité mais dans une logique de marché : le socle n'est pas l'Union qu'on nous promet mais la devise classique « Aide-toi, le ciel t'aidera. » Cependant cette logique purement financière, qui ne se base en définitive que sur des Traités Internationaux et se cache derrière un paravent politique insuffisant dans sa forme et son pouvoir et aux fondements démocratiques douteux, n'est plus acceptable dans la situation actuelle.
L'Union dans laquelle nous cherchons à coexister est une création imaginée durant une idée d'une période révolue (les Trente Glorieuses) et reposant à l'époque sur un socle restreint viable (France, RFA, Italie, Be-Ne-Lux). L'Union actuelle ne peut pas fonctionner sur le même système du fait des disparités économiques, sociales et démographiques entre ses différents États.
Le constat est aujourd'hui celui d'un choix impérieux entre l'adaptation et la disparition.
La nécessité d'une Europe politique, fédérale et solidaire.
L'adaptation car il n'est pas concevable que la dette d'un État, inférieure à 3% du PIB européen, puisse mettre l'Union dans une situation économique et financière telle que la crise qui en découle fasse tanguer dangereusement la construction politique. L'Europe n'a pas besoin de plan d'orthodoxie ou d'une cure de rigueur. Elle a besoin que l'Union ne soit plus simplement un libre marché vaguement institutionnalisé mais bien une structure solidaire.
L'Europe doit être politique et fédérale ou doit disparaître. Les États membres doivent accepter, selon le modèle américain ou suisse, de transmettre à l'Union certaines prérogatives régaliennes et politiques essentielles afin que la construction européenne ne soit plus un mythe mais une réalité tangible et efficace.
Aujourd'hui, la puissance économique européenne en fait un acteur décisif de l'ordre du Monde, mais sa division politique en fait surtout un géant aux pieds d'argile, une hydre gigantesque certes mais dont aucune tête ne regarde réellement dans le même sens que les autres.
« Pour gouverner, il faut être un nombre impair mais trois c'est déjà trop. » Comme on sut en leur temps le comprendre Clemenceau et le Général De Gaulle, espérons que les 28 seront acceptés de n'être plus qu'un.