« J’ai la réponse à ta question, dit-il.
_Quelle est-elle ? questionna Shin.
_J’éprouve du remord lorsque je me bat mais si je sais que je guerroie pour une cause juste mon cœur n’a point à les écouter.
_Et qu’est ce qu’une « cause juste » ?
_La défense de ceux qui ne peuvent point le faire par eux-mêmes : telle est la seule et unique cause qui puisse permettre à un homme d’oublier ses regrets. J’ai bien répondu ?
_As-tu donné la réponse d’un livre ou celle de ton cœur ?
_La mienne.
_Alors tu as bien répondu à la question, même si certains de tes actes ne sont pas en accords avec tes paroles. Que veux tu ?
_Je veux me battre. »
Shin soupira puis jaugea rapidement son adversaire du regard. « Je ne suis pas sur de l’emporter contre lui sans mon draich mais je ne pense pas qu’un vrai combat me fasse plus de mal que de bien. » Il se releva en s’étirant les muscles des bras et du cou.
« Si cela peut te faire plaisir… dit-il.
_Une dernière question avant de commencer.
_Vas-y, je suis tout ouïe.
_Ta propre réponse, quelle est-elle ?
_Ne pose pas des questions dont tu ne veux pas connaître les réponses, » répondit-il sa voix légère comme une brise glacée.
A ce moment-là un autre personnage émergea des escaliers, il se tint dans l’obscurité incertaine de l’embrasure de la porte et jeta un sabre en bois à Shin.
« Tu me le rendras à la fin du combat.
_Pourquoi faites-vous cela ?
_Parce que même si tu as été exclu, tu as aussi été mon élève. Néanmoins garde ceci en mémoire : reste calme, de notre colère naît notre perte.
_Oui…maître. »
Il caressa la lame et se mit en garde. « Regardez bien maître, car un jour vous aussi vous reconnaîtrez que j’avais raison, » songea-t-il. La tension était à son paroxysme. Shin avait opté pour une position défensive classique, Wladimir pour une approche plus offensive. « Lequel des deux ? Il m’a dit que son fils était capable de tout, même de simuler la défaite pour parvenir à ses fins. Mais face à Wladimir, il ne pourra rien sans faire preuve de certaines capacités, » réfléchit Aspidistra.
Les lames de bois s’entrechoquèrent, le temps se figea une seconde puis les coups tombèrent comme la pluie dans les montagnes rocheuses. Deux démons se faisaient face rivalisant d’adresse et de force, usant de toutes les techniques qu’ils maîtrisaient. Ils bondirent, esquivèrent et parèrent les assauts de l’adversaire. Aucun ne parvint à prendre l’avantage sur l’autre. Soudain Shin se fendit pour porter une attaque d’estoc mais Wladimir la dévia et riposta du plat de la lame à la gorge de Shin, le touchant il l’envoya mordre la poussière. Shin resta couché au sol sonné par le choc. Wladimir lui écrasa la main du pied.
« Et je suis prêt à le refaire. »
Il marcha vers les escaliers. Shin s’assit contre un mur alors que les capitaines disparaissaient dans la cage d’escalier. Il se massa la gorge précautionneusement avec un mouchoir. Il se leva et sortit, le visage caché derrière ses cheveux et son mouchoir. Il rendit le sabre à l’étudiant qui lui glissa quelque chose à l’oreille. Hans qui semblait l’attendre dans l’escalier lui dit un mot. Shin ne vint pas en cours l’après-midi.