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Viola
Virág
Virgil
Vivien
Zsófia
Zsóka
Zsolt
Zsombor
Zsuzsanna
Autriche carte du XIXième Siècle
Carte de l'Empire d'Autriche et du Royaume de Hongrie
Carte de la Transylvanie hongroise
Amis
de la justice et du fascisme, bonjour !
Freunde der Gerechtigkeit und des Faschismus. Heil HITLER !
De quoi... de quoi, est-ce qu'on accuse-t-on, mon client ?
Oui je sais, oui je sais !
Je sais, comme dirait GABIN, que l'extrême droite ce n'est pas le fascisme.
Je sais !
Mais on a quand même le droit d'être fasciste même si on est pas d'extrême droite, MERDE !
Ne m'énervez pas !
Nous sommes en démocratie, profitons-en car quand l'extrème-droite sera au pouvoir, on aura peut-être plus le droit d'être fasciste ! Heil HITLER !
Je suis fasciste. Je m'assume. Je vous laisse vivre. Foutez-moi la paix !
C'est vrai quoi ! Les gens dès que vous dites « je suis fasciste », vous regarde d'un mauvais œil, alors qu'il suffit de ne pas le dire et personne s'en aperçoit !
Y'en a marre ! Je suis un citoyen comme les autres : Vive la France ! Vive le Fuhrer !
Et qu'est-ce que vous croyez amis de la tolérance ? Que nous sommes plus à cran que les autres ? C'est faux... c'est faux : nous sommes aussi énervé que les autres ! Face aux injustices et au laisser aller, au manque de respect et de responsabilité de nos dirigeants !
Savez-vous au moins ce que nous voulons ? Eh ben je vais vous le dire !
Une société PARFAITE ! Une société parfaite, amis libéraux, écoutez-moi bien, c'est une société où les chiens font où l'on leur dit de FAIRE ! Où il n'y a pas de GRÈVES ! Où les partis politiques viennent pas nous beurrer la raie à la télé ! Où les travailleurs immigrés st là pour travailler et non pas pour se goinfrer de couscous ou de morue ! Où le terrorisme doit être INTERDIT ! Où les riches doivent être contents d'être riches et les pauvres contents d'être pauvres ! Où tout le monde doit être uni contre tous les AUTRES ! Où l'oncle doit être marié avec la tante ! BREF, une société parfaite, c'est une société où l'on ne rit pas BÊTEMENT !
C'est ce qu'on demande : le bonheur et rien de plus.
J'ai été élevé dans une ambiance fasciste et si je respecte mes parents c'est grâce à eux !
Mais je suis sûr que vous vous demandez comment un nazi peut vivre heureux au milieu de cette pagaille ?
Eh bien c'est très simple.
Je peux vous dire ce que j'ai fait hier.
5h du matin : je saute de mon lit en fer où je dors sur des clous. Mon réveil automatique me chante « ay li ay lo, AY LO ! ». Encore endormi je salue le portrait du Führer « Heil Hitler ! », qui est juste au dessus de mon lit, avant de me laver les dents avec une brosse en fer également !
6h : petit-déjeuner composé de saucisses de Francfort, pommes de terre, choucroute, bière à volonté.
7h : j'achète Minute pour me tenir au courant de ce qui se passe chaque minute dans le monde.
8h : j'ai finis la première page et je relis Mein Kampf ainsi que les oeuvres complètes d'Himmler sur l'organisation des SS et le salut de la race Aryenne.
9h : je pars déjouer le complot contre mon pays et je me rend aujourd'hui à la Brasserie Munichoise, rue de Verdun. Il fait plus de 5 degrés, j'ai très chaud ! Je bois deux bières.
10h : il fait une chaleur infernale : 7 degrés ! Je fais remarquer gentiment au barman qu'il est arabe et que c'est pas une raison pour être aussi long à me servir une cinquième bière.
11h : après avoir entendu dire du mal de la France dans cette brasserie, je pars, ÉCŒURÉ !
Midi : je fais quelques courses : deux kilos de pommes de terre, une boîte de Francfort, deux kilos de choucroute, dix litres de bière allemande et une matraque.
1h : mon concierge portugais me dit bonjour, je ne lui réponds pas, comme d'habitude. Ça sent encore la morue partout dans la cage de l'escalier.
2h : pendant que la choucroute cuit, je bois une bière en préparant une pétition afin de faire expulser le noir du 6ème, ainsi que le concierge portugais et toute sa famille, parce qu'il a fermé la porte de l'entrée de l'immeuble à 10h05 au lieu de 10h.
3h : c'est plus de la choucroute, c'est de la bouillie, tant pis je bois une bière en écoutant du Wagner.
4h : je reçois un coup de fil anonyme d'une voix qui me dit : « Salaud ! on aura ta peau ! » (accent africain). Je suis sûr que c'est le noir du 6ème, sur la porte duquel j'ai gravé une croix gammée à la hache hier soir ! Je l'emmerde !
4h30 : je cire mes bottes d'officier allemand S.S. que j'ai acheté aux puces puis je me mets mon manteau de cuir noir avant de me rendre chez le tatoueur. Et je bois une bière pour la route.
5h : il est exactement 5h pile ! Je rentre chez le tatoueur pour me faire faire un tatouage du Führer sur l'omoplate droite. La séance commence. Au bout de cinq minutes les douleurs sont intenables ! Je sers les dents sur le goulot de ma canette. Mais l'amour du Führer demande beaucoup d'abnégation. Tout d'un coup, horreur ! Horreur ! Je m'aperçois que la chaîne que le tatoueur porte à son poignet est gravée de son nom : Lévi ! LEVI ! J'ai du mal à contenir un cri de rage ! Lévi me fait de plus en plus mal ! Je suis torturé par un JUIF ! J'ai mal, j'ai MAL ! C'est long. Pourvu qu'il ne s'aperçoive pas de mon admiration pour les allemands !
6h45 : le tatoueur me dit « C'est presque finis. Si vous voulez je peux vous faire Himmler sur l'omoplate gauche. » Oh l'enflure ! Je le paye et je m'en vais.
7h : je ne peux plus bouger mon bras droit. Les douleurs sont insupportables. Je prends le métro. Dans un couloir une affiche d'Amnesty International provoque chez moi une haine sanguinaire ! Sanguinaire ! Je sors mon gros feutre noir de ma poche avec ma main gauche pour exprimer ma RAGE ! Mais j'ai du mal à écrire avec ma main gauche.
7h30 : après avoir fait des pâtés sur l'affiche, j'arrête un passant et je lui demande gentiment de marquer dessus avec mon feutre « Mort aux juifs et aux bougnouls ! » Le type me demande en rigolant « Bougnouls, ça prend deux « L » ? » (autre accent africain). Je lui dis : « Fais ce que je te dis et ta gueule ! » Aussitôt il me balance un coup de tatane dans les tibias et un second dans le bras gauche. LA VACHE !
8h : écroulé à terre j'ai mal partout. Une main charitable me prête secours. C'est la main d'un policier. Il me dit « Qu'est-ce qui se passe ? » Je lui dis « Oh ben ! J'ai empêché un salaud d'écrire des injures sur l'affiche ! Et il m'a assommé... » Le policier me dit : « Vous êtes pas le seul dans ce cas là. Hélas ! » Il essaie de me relever par l'omoplate droite et je pousse un hurlement de douleur : « Aaaaaiiiie ! »
8h30 : je me traîne en boitant, les deux bras mortifiés, devant la brasserie munichoise. Je tombe sur la belle Elsa, ses cuissardes, son berger allemand. Elle me dit : « Ça fait longtemps que je t'ai pas vu, tu montes ? » Je lui dis : « Oui ! j'ai besoin d'amour. »
9h : je donne ma matraque à Elsa, je m'allonge sur son matelas sordide et je lui dis : « Achève-moi, salope, ça va me détendre ! » Elle retire son manteau de renard et elle commence à m'écraser la gueule à coups de matraque. Je lui dis : « C'est bon, c'est bon, ça me fait du bien quand tu me fais mal ! » Elle me dit : « Hein, t'aime ça salaud ! Hein, t'aime ça ? ! » Je lui dis : « Oui oui, oui oui, dis à ton chien de me mordre aussi ! »
9h30 : j'ai des frissons... Je suis en lambeaux. Le chien ne m'a pas loupé ! Mais j'ai jamais aussi bien fait l'amour de ma vie. Je repasse à la brasserie pour reprendre une bière pour la route. Je ne tiens plus debout...
10h05 : j'arrive à quatre pattes devant la porte de mon immeuble. Elle est FERMÉE ! Et j'ai oublié la clé, MERDE ! Et ce con de Portos qui a fermé à l'heure ! Fou de rage je balance des coups de tatane dans la lourde « vloum, VLAOUM ! » Parce que mes bras me font trop mal. Mais il fait semblant de ne pas m'entendre l'enflure !
Minuit : je tombe de fatigue et de sommeil et je me couche dans une poubelle après avoir vomi.
4h du mat' : j'ai des frissons. J'entends la porte qui s'ouvre. C'est le noir du 6ème qui part au boulot. Je hurle : « Laissez la porte ouverte ! » Il me dit : « Je ne réponds pas aux gens qui me parlent d'une poubelle ! » Et il me claque la porte au nez ! QUEL SALAUD ! Les gens de cette espèce-là, faudrait s'en débarrasser une bonne fois pour toute !
HEIL HITLEEEEEEEEER !
[Les Réquisitoires du Tribunal des Flagrants Délires - Tome 1 - Seuil-France-Inter - 11-2003]
Françaises, Français,
Belges, Belges,
Extrémistes, Extrémistes,
Mon président français de souche,
Mon émigré préféré,
Mesdames et Messieurs les jurés,
Mademoiselle Le Pen, mademoiselle Le Pen,
Mademoiselle Le Pen, madame Le Pen,
Public chéri, mon amour.
Comme j'ai eu l'occasion de le démontrer, ici même, récemment, avec un brio qui m'étonne moi-même malgré la haute estime en laquelle je me tiens depuis que je sais qu'il coule en mes veines plus de 90 % de sang aryen et, moins de trois grammes de cholestérol, les débats auxquels vous assistez ici, quotidiennement, mesdames et messieurs, ne sont pas ceux d'un vrai tribunal. En réalité, je le répète, ceci est une émission de radio. Qui pis est, une émission de radio dite comique. Ou au moins qui tente de l'être.
Alors le rire, parlons-en et parlons-en aujourd'hui, alors que notre invité est Jean-Marie Le Pen. Car la présence de Monsieur Le Pen en ces lieux voués le plus souvent à la gaudriole para-judiciaire pose problème. Les questions qui me hantent, avec un H comme dans Halimi sont celles-ci :
Premièrement, peut-on rire de tout ?
Deuxièmement, peut-on rire avec tout le monde ?
A la première question, je répondrai oui sans hésiter, et je répondrai même oui, sans les avoir consultés, pour mes coreligionnaires en subversions radiophoniques, Luis Rego et Claude Villers.
S'il est vrai que l'humour est la politesse du désespoir, s'il est vrai que le rire, sacrilège blasphématoire que les bigots de toutes les chapelles taxent de vulgarité et de mauvais goût, s'il est vrai que ce rire-là peut parfois désacraliser la bêtise, exorciser les chagrins véritables et fustiger les angoisses mortelles, alors, oui, on peut rire de tout, on doit rire de tout. De la guerre, de la misère et de la mort. Au reste, est-ce qu'elle se gêne, elle, la mort, pour se rire de nous ? Est-ce qu'elle ne pratique pas l'humour noir, elle, la mort ? Regardons s'agiter ces malheureux dans les usines, regardons gigoter ces hommes puissants boursouflés de leur importance, qui vivent à cent à l'heure. Ils se battent, ils courent, ils caracolent derrière leur vie, et tout d'un coup, ça s'arrête, sans plus de raison que ça n'avait commencé et, le militant de base, le pompeux PDG, la princesse d'opérette, l'enfant qui jouait à la marelle dans les caniveaux de Beyrouth, toi aussi à qui je pense et qui a cru en Dieu jusqu'au bout de ton cancer, tous, nous sommes fauchés, un jour, par le croche-pied de la mort imbécile et les droits de l'homme s'effacent devant les droits de l'asticot. Alors, qu'elle autre échappatoire que le rire, sinon le suicide ? Poil aux rides ?
Donc, on peut rire de tout, y compris de valeurs sacrées, comme par exemple, le grand amour que vit actuellement le petit roi inamovible de la défense passive, ici présent. Elle s'appelle Marika, c'est la seule aryenne qu monde qui peut le supporter, ce qu'on comprendra aisément quand on saura qu'il s'agit de la poupée gonflable et peau de morue suédoise que sa tata Rodriguez lui a envoyé de Lisbonne en paquet fado.
Deuxième question : peut-on rire avec tout le monde ?
C'est dur… Personnellement, il m'arrive de renâcler à l'idée d'inciter mes zygomatiques à la tétanisation crispée. C'est quelquefois au-dessus de mes forces, dans certains environnements humains : la compagnie d'un stalinien pratiquant me met rarement en joie. Près d'un terroriste hystérique, je pouffe à peine et, la présence, à mes côtés, d'un militant d'extrême droite assombrit couramment la jovialité monacale de cette mine réjouie dont je déplore en passant, mesdames et messieurs les jurés, de vous imposer quotidiennement la présence inopportune au-dessus de la robe austère de la justice sous laquelle je ne vous raconte pas. Attention, ne vous méprenez pas sur mes propos, mesdames et messieurs les jurés : je n'ai rien contre les racistes, c'est le contraire, comme dirait mon ami le brigadier Georges Rabol qui, je le précise à l'intention des auditeurs qui n'auraient pas la chance d'avoir la couleur, est presque aussi nègre que pianiste. Dans Une journée particulière, le film d'Ettore Scola, Mastroianni, poursuivi jusque dans son sixième par les gros bras mussoliniens, s'écrie judicieusement à l'adresse du spadassin qui l'accuse d'anti-fascisme : "Vous vous méprenez, monsieur : ce n'est pas le locataire du sixième qui est anti-fasciste, c'est le fascisme qui est anti-locataire du sixième."
"Les racistes sont des gens qui se trompent de colère", disait, avec mansuétude, le présidant Senghor, qui est moins pianiste, mais plus nègre que Georges Rabol. Pour illustrer ce propos, je ne résiste pas à l'envie de vous raconter une histoire vraie, monsieur Le Pen, cela nous changera des habituelles élucubrations névropathiques inhérentes à ces regrettables réquisitoires.
Je sortais récemment d'un studio d'enregistrement, accompagné de la pulpeuse
comédienne Valérie Mairesse avec qui j'aime bien travailler, non pas pour de
basses raisons sexuelles, mais parce qu'elle a des nichons magnifiques.
Nous grimpons dans un taximètre sans bien nous soucier du chauffeur, un monotone
quadragénaire de type romorantin, couperosé de frais, et poursuivons une conversation
du plus haut intérêt culturel, tandis que le taxi nous conduit vers le Châtelet.
Mais, alors que rien ne le laissait prévoir et, sans que cela ait le moindre
rapport avec nos propos, qu'il n'écoutait d'ailleurs pas, cet homme s'écrie
soudain :
"Eh
bien moi, les Arabes, j' peux pas les saquer."
Ignorant ce trait d'esprit sans appel, ma camarade et moi continuons notre débat.
Pas longtemps. Trente secondes plus tard, ça repart :
"Les Arabes, vous comprenez,
c'est pas des gens comme nous. Moi qui vous parle, j'en ai eu comme voisins
de palier pendant trois ans. Merci bien. Ah, les salauds ! Leur musique à la
con, merde. Vous me croirez si vous voulez, c'est le père qu'a dépucelé la fille
aînée ! ça, c'est les Arabes."
Ce coup-ci, je craque un peu et dis :
"Monsieur, je vous en prie,
mon père est arabe.
- Ah Bon ? Remarquez, votre père,
je dis pas. Il y en a des instruits. On voit bien que vous êtes propre et tout.
D'ailleurs, je vous ai vu à Bellemare."
A l'arrière, bringuebalés entre l'ire et la joie, nous voulons encore ignorer.
Las ! La pause est courte :
"Oui, votre père je dis
pas. Mais alors, les miens d'Arabes, pardon. Ils avaient des poulets vivants
dans l'appartement et ils leur arrachaient les plumes rien que pour rigoler.
Et la cadette, je suis sûr que c'est lui aussi qui l'a dépucelée. Ça s'entendait.
Mais votre père, je dis pas. De toute façon, les Arabes, c'est comme les Juifs.
Ça s'attrape que par la mère."
Cette fois-ci, je craque vraiment :
"Ma mère est arabe.
- Ah bon ? La Concorde, à cette heure-là,
y a pas moyen. Avance, toi, eh connard ! Mais c'est vert, merde. Retourne dans
ton 77 ! Voyez-vous, monsieur, reprend-il, à mon endroit, à mon derrière, voulez-vous
que je vous dise ? Il n'y a pas que la race. Il y a l'éducation. C'est pour
ça que votre père et votre mère, je dis pas. D'ailleurs, je le dis parce que
je Le Pense, vous n'avez pas une tête d'Arabe. Ça c'est l'éducation. Remarquez,
vous mettez un Arabe à l'école, hop, y joue au couteau. Et il empêche les Français
de bosser. Voilà, 67, rue de la Verrerie, nous y sommes. Ça nous fait trente-deux
francs."
Je lui donne trente-deux francs.
"Eh, eh, vous êtes pas
généreux, vous alors, et le pourliche !
- Ah, c'est comme ça, me vengeais-je
enfin, je ne donne pas de pourboire aux Blancs !"
Alors, cet homme, tandis que nous nous éloignons vers notre sympathique destin,
baisse sa vitre et me lance :
"Crève donc, eh, sale bicot."
A moi, qui ai fait ma première communion à la Madeleine !
Voilà, mesdames et messieurs les jurés, voilà un homme qui se trompait de colère. Le temps qui m'est imparti socialiste, mais pas national, c'est toujours ça de pris, ainsi que la crainte de quitter mon nez rouge pour sombrer dans la démonstration politico-philosophique m'empêchent de me poser avec vous la question de savoir si ce chauffeur de taxi était de la race des bourreaux ou de la race des victimes ou les deux ou, plus simplement, de la race importune et qui partout foisonne, celle, dénoncée par Georges Brassens, des imbéciles heureux qui son nés qui sont nés quelque part :
"Quand sonne le tocsin sur leur bonheur précaire,
Contre les étrangers tous plus ou moins barbares,
Ils sortent de leur trou pour mourir à la guerre,
Les imbécil's heureux qui sont nés quelque part."
Aussi laisserai-je, maintenant, la parole à mon ami Luis Régo, qui poussa, naguère, ici même, le plus troublant des cris d'alarme : "Les chiffres sont accablants : il y a de plus en plus d'étrangers dans le monde."
Pierre Desproges
[ Les Réquisitoires ont été prononcés par Pierre Desproges (le procureur) sur l'antenne de France Inter dans le cadre de l'émission Le Tribunal des Flagrants Délires, émission imaginée et produite par Claude Villers (le président) et Monique Desbarbat avec Luis Rego (l'avocat). ]
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