posté le 14-06-2009 à 00:07:57

2 octobre...(1)

          Ekichi réunit les dix-huit joueurs qui devaient jouer le match contre l’équipe féminine de l’Université de Seattle : au goal : Pierce titulaire, Gordon remplaçant, en défense : Tony, Franck et Paolo titulaires, Alf, Phil et Gary remplaçants, au milieu : Bobby, Bob et Shin titulaires, Michael et Gianni remplaçants, en attaque : Brian et Chris titulaires, ailiers : Diego et Johann. Pierce se tourna vers Chris.

« Et Geoff ? 

_Il viendra mais peut-être pas aujourd’hui, il ne sait pas s’il veut revenir, en fait. 

_Compréhensible après ses démêlés avec Lothar et Marco. 

_Il joue à quel poste ? »

Pierce et Chris se tournèrent vers Ekichi.

« Attaquant. 

_Alors on pourrait l’utilisé en combinaison avec Shin en attaque et Michael au milieu. 

_Shin n’est pas un milieu ? 

_C’est mon poste de prédilection mais je suis aussi très bon en attaquant, c’est à se poste que j’ai commencé d’ailleurs. »

Quelqu’un frappa à la porte, tous se retournèrent alors que la porte s’entrouvrait.

« Je suis venu pour m’inscrire, je m’appel Geoff Harst et je joue au poste d’avant-centre. »

Ekichi le jaugea du regard puis il se rassit jeta un coup d’œil à la feuille sur laquelle Pierce avait inscrit les différentes tactiques possibles à son avis.

« Tu penses qu’on peut lui faire confiance ? 

_Oui, répondit Pierce sans une ombre d’hésitation.

_Alors je vais le mettre à l’essaie. Geoff, vingt tours de terrain immédiatement ensuite tu auras vingt occasions pour marquer au moins un but à Pierce et sa défense, réussie et tu seras le dernier remplaçant pour le match de samedi. 

_Bien, monsieur. 

_Tu as vingt minutes pour la première épreuve. 

_Oui, monsieur. »

« Quel monstre, » pensa-t-il.

            Vingt minutes plus tard, Geoff finissait ses vingt tours de terrains – sur les rotules – et commençait ses actions, seul face à Pierce, Tony, Franck et Paolo. Shin accepta de lui faire la passe décisive. Geoff se pencha vers Shin pour lui souffler quelques informations à son oreille.

Shin se déplaça sur la gauche du terrain et centra. Geoff, déporté sur la droite, contrôla le long service aérien, crocheta Paolo, évita Franck et, de l’extérieure du pied droit, plaça le ballon sous la barre transversale. C’était cependant sans compter sur les réflexes de Pierce qui caressa le ballon déviant celui-ci sur la barre. Tony le dégagea de la tête. Shin le récupéra et recula jusqu’au rond central. Geoff revint s’y placer également, Shin poussa le ballon devant lui.

« Montre-moi ce dont tu es capable. »

Geoff le prit et s’avança calmement. Paolo vint à sa rencontre. Geoff le passa grâce à sa maîtrise du jongle en mouvement, puis il profita de sa vitesse supérieure pour prendre Franck à contre-pied, il entra dans la surface par la droite, esquiva un tacle de Tony puis résistant au retour de Paolo, il fit glisser le ballon de son pied droit à son pied gauche et l’enroula de l’intérieur du pied. La balle, tirée en déséquilibre, semblait néanmoins devoir finir sa course au-dessus de la barre. Pierce ne bougea pas. Le ballon s’éleva puis redescendit plongeant dans la lucarne. Geoff jeta un coup d’œil à Shin, celui-ci leva le pouce en signe d’encouragement.

« Pas mal. »

            Jimmy vint trouver Shin à la fin de l’entraînement. Le club de tennis jouait son deuxième match du tournoi municipal le dimanche et il comptait sur son deuxième meilleur joueur de simple pour écraser toute opposition – la seule rumeur d’un joueur pouvant faire jeu égal avec Jimmy avait incité leurs premiers adversaires à abandonner une semaine plus tôt – afin d’accéder au tournois national. Mais une autre chose l’inquiétait pour l’instant.

« Tu connais le nouveau qui a été transféré depuis l’Oklahoma et qui est arrivé hier ? 

_Celui qui mesure un peu plus de deux mètres ? 

_Oui.

_Et bien ? 

_Il veut s’inscrire au club, parait-il. 

_Plus on est de fous et plus on rit, non ? 

_Oui et ça nous permettra sûrement de refaire jouer Pat en double avec Lleyton tout en disposant de trois joueurs capables de gagner en simple. Mais je crains surtout pour l’esprit d’équipe en fait. 

_Si tu t’en faisait tant pour cela tu n’aurais pas accepté que j’y rentre. 

_Oui, peut-être. »

            La récréation permit à Shin d’obtenir les informations qui lui convenaient auprès de Leila, dans un de ses rares moments de « lucidité » en dehors des heures de cours.

« Que veux-tu ? 

_Des informations sur le nouveau qui a été transféré hier. 

_Retourne-toi et demande-lui toi-même. 

_Pardon ? »
 


 
 
posté le 14-06-2009 à 00:06:46

Adversaires ou alliers ?

            Pierce et Pat entrèrent sur le court alors que Phoebe demandait la trousse de secours, Aspidistra resta figée les yeux fixés sur Shin. Ceux-ci s’agrandirent brusquement.

« Shin… »

Tous étaient pétrifiés autour du terrain. Il avait commencé à se relever peu à peu, titubant sur ses jambes et s’appuyant sur sa raquette.

« Je vais bien, aide-moi Pierce, je vais m’asseoir un peu. »

Pierce le prit sur son épaule et l’aida à atteindre le banc. Jimmy s’assit à côté de lui.

« Ta dernière technique a un défaut, je peux la contrer. 

_Ah oui ? Comment ? 

_Au moment où la balle rebondit, il faut sauter en arrière et frapper un coup droit lifté ou un smash de fond de court. 

_Mais je peux te contrer au filet. 

_Pas si ma balle est assez lourde et si je reste sur la ligne de service parce qu’alors tu t’exposeras à un passing et tu redescendras sur ta ligne de fond et alors je n’ai qu’a utilisé mon drop shot. 

_Qui sera inefficace si je reste au filet. 

_Alors je n’ai qu’à exécuter ou un passing ou un lob. 

_Ca se tient mais est-ce que ça marchera en vrai ? 

_On verra ça demain. 

_Repose-toi bien pour demain. 

_Pas de problème, capitaine. »

Pierce et Aspidistra aidèrent Shin à rentrer chez lui. Phoebe, elle, resta avec Jimmy pour discuter semblait-il. 

           Il y eut un soir, il y eut un matin…
 


 
 
posté le 14-06-2009 à 00:04:48

1 octobre...(5)

James fronça les sourcils, la nature pieuse et renfermée du personnage se dessinait peu à peu mais le plus intéressant à développer serait la part de boy-scout qui restait au fond de son âme. Il ferma son cahier, le rangea, se leva et sortit sac à l’épaule.

            Chaps se retourna vers Shô.

« Tu vois même pour lui, c’était trop tôt, face à nous deux et sans être à son maximum, il ne pouvait faire mieux que ça. »

Shô ricana.

« Regarde mieux avant de parler, les fous sont toujours imprévisibles. »

Chaps se tourna et ses yeux s’écarquillèrent.

« Impossible ?!? »

Shin s’était relevé, ses cheveux noirs tombant sur son visage ne laissent voir que les deux pupilles rouges sang, autour de lui l’air semblait compressé et sombre.

« Tu le sais pourtant que cet idiot a des capacités hors normes et qu’il est définitivement bon pour l’asile.

_Shô, c’est une aura.

_Oui, une aura guerrière comme celle qu’utilise les véritables maîtres au club et certains membres des gangs. Mais pas n’importe laquelle : une aura noire, l’aura du… 

_Shô… »

Bien que les contours soient encore assez flous, un énorme reptile d’un noir de jais entourait ses anneaux autour de Shin.

« L’aura du Dragon. »

Shô se jeta en avant mais Shin pencha la tête et contre-attaqua d’un direct qui l’envoya dans la poussière. Cependant Chaps avait prévu le coup et l’avait contourné de sorte qu’il mit fin au combat en frappant à la nuque.

« Dors, tu en a besoin après ça. »

James passa l’embrasure de la porte, immédiatement son regard fut accroché par la forme étendue au sol : Shin, il détourna les yeux et croisa ceux de Kate, ils étaient livides, comme pour les autres membres du groupe. Il fixa Shô puis Chaps et si l’impression de peur se reflétait moins chez eux, elle n’était cependant pas absente. Il s’avança et prit tendrement Kate dans ses bras, puis réunissant tout le flegme et la morgue dont il était investit, il demanda :

« Que c’est-il passé ? »

            Shin fut conduit à l’infirmerie où il se réveilla au bout de quelques minutes peu avant la fin de la pause. Il cligna des yeux, puis se redressa en se massant la nuque.

« Douloureux. Tu as attendue que je me réveille ou tu viens juste d’arriver ? 

_Ce n’est sûrement pas la politesse ou la gentillesse qui t’étouffe, je suis là depuis que Shô et Chaps t’ont amené ici. 

_Pardon. 

_Oh, tu sais je commence à être habituée à ton mauvais caractère… »

Shin voulu parler mais elle l’arrêta d’un geste de la main.

« …tu devrais apprendre à faire confiance aux autres, sans cela nous ne sommes rien. »

Elle se leva et sortit.

« Dépêche-toi tu vas être en retard en cours. »

Il la regarda partir.

« Mauvais caractère, hein ? A se demander qui est le maître et qui est l’élève. »

Il bailla, s’étira puis sortit du lit, passa sa veste et, après avoir remercier l’infirmière, il quitta l’infirmerie pour retourner en classe.

            L’après-midi devait s’arrêter à quinze heures vingt mais Shin suivit ensuite l’entraînement du club de football durant une heure et demi, puis rejoignit le club de tennis. Ce fut alors que Jimmy lui proposa de faire à nouveau un match pour savoir si Shin avait retrouvé son niveau habituel.

Les deux adversaires désignèrent ceux qui seraient arbitres et celui qui aurait le service en premier. Shin eut le service. Il se plaça derrière sa ligne de fond de court, raquette dans la main droite, posant son pied gauche à la perpendiculaire de son pied droit et de la ligne, il faisait rebondir la balle avec sa main gauche.

« Prêt ? »

Jimmy acquiesça. Shin lança la balle en l’air tout en sautant puis la frappa au moment où elle commençait à redescendre. La balle traversa le terrain, décrivant une courbe parfaite pour rebondir dans le coin central du court. Jimmy s’était prestement avancé pour la renvoyer mais le rebond se fit avec un effet inversé et elle lui frappa le visage de plein fouet.

« Twist speed service, » souffla Pat, « le match risque d’être redoutablement intéressant.

_15-0, » annonça l’arbitre.

Shin se remit en position de service, raquette dans la main gauche. Il exécuta trois fois encore le twist speed service marquant successivement trois aces pour remporter un jeu blanc.

« Un jeu pour Shin Itchie. »

C’était au tour de Jimmy d’engager, son no-rotation service – balle envoyée avec aucune rotation – surpris deux fois Shin avant que celui-ci ne parvienne à le retourner d’un puissant coup droit exécuté sans effet le long de la ligne de couloir.

Les deux joueurs se rendaient coups pour coups. Shin, continuellement en mouvement grâce à sa technique de reprises d’appuie, et Jimmy, dont la précision et la puissance mettaient l’endurance de son challenger à rude épreuve, s’arrêtèrent brusquement de bouger tout en poursuivant l’échange.

Pat et Pierce, qui observaient le match derrière le grillage avec Phoebe et Aspidistra, se regardèrent mutuellement puis après un long soupir commun exprimèrent leurs conclusions.

« Ils sont forts. 

_Regarde mieux leurs pieds, seul leur pied gauche bouge, le droit demeure fixement au même endroit. Les balles qu’ils envoient arrivent toujours au même point, ça se voit aux deux marques qui sont apparues à leur droite et à leur gauche. 

_Le plus impressionnant dans tout cela reste néanmoins la puissance et la vitesse de chaque balle, elles atteignent facilement les 130 ou 150 kilomètres/heures. 

_Jimmy a gagné le point. 

_Non, Shin la reprend grâce à ses reprises d’appuie. 

_Jimmy utilise des techniques d’un niveau national. 

_Mais Shin peut compter sur la technique des deux lames conjuguée à son rising qui sont également d’un très haut niveau. 

_Jimmy n’a pas encore joué sa dernière carte. »

C’était Phoebe qui avait parlé.

« Quel coup spécial ? 

_Le magical mystery tour, le mystérieux coup du magicien, un buggy wish shot twisté d’une puissance si incroyable que le dernier adversaire contre qui il l’a utilisé a fini à l’hôpital avec la mâchoire brisée. »

Soudain Jimmy décala son pied gauche vers l’avant, posant son genou droit à terre et renvoya la balle d’un coup droit frappé juste après le rebond.

« Shin a perdu, Pierce prépare toi à le transporter chez lui. »

La balle contourna le poteau de filet, passa derrière la ligne de fond de court, décrivit un arc de cercle pour venir rebondir entre les jambes de Shin.

« Magical mystery tour. »

Elle remonta verticalement pour heurter le visage de Shin. Celui-ci fut soulevé par le choc et retomba lourdement au sol.

« Jimmy a gagné… 

_Pas encore. »

Jimmy était monté au filet après que le choc. L’assistance comprit pourquoi lorsque la balle s’écrasa sur la bande blanche du filet, celle-ci vibra puis la balle retomba du côté de Shin.

« Jeu, set et match, Jimmy Trabert 7 jeux à 5. »

 


 
 
posté le 14-06-2009 à 00:04:02

1 octobre...(4)

            Sur les toits, la tension était à son paroxysme. Chaps et Shô Senkami s’était mis en garde face à Shin, la provocation était claire. Shin enleva sa veste, s’étira rapidement puis prit une posture de combat. « Effrayant » fut la première pensée qui germa dans l’esprit d’Aspidistra. Shô et Chaps échangèrent un sourire énigmatique puis attaquèrent…

            James continuait d’écrire. Il s’arrêta un instant et étudia à nouveau les autres élèves du coin de l’œil. « Une mise en abîme ? Et si je poussais le vice jusqu’à lui faire réellement raconter une histoire ? Le thème de la rencontre me permet d’exprimer toutes les idées que je pourrais avoir et de décrire tout ce que j’ai appris, mais d’abord essayons de nous faire plaisir… » Sa plume glissa dextrement sur la feuille :

« Je laisse tomber ma tête en arrière, mes yeux se ferment, je soupire calmement, déjà je me suis redressé, j'ai empoigné mon stylo, j'ai attrapé mon cahier, la plume sur la page glisse fébrilement, chaque mot semble une goutte de sang, j'écrit en rouge, qui ruisselle dans une vaste plaine blanche faisant germer à chaque goutte une fleure et une larme... »

James tira un calepin qui lui servait d’agenda et en sortit une feuille de papier froissée à l’encre un peu effacée par endroit. « Finalement cette petite page que j’avait griffonné en quatrième va me servir. 

« " Le vent froid glaçait les gouttes de pluie avant la fin de leur voyage. Le col remonté, l'écharpe nouée autour du cou, la gabardine tombante, j'avançais difficilement, devant à chaque pas écarter un amoncellement impressionnant de neige. Fatigué, je décidais de faire halte quelques instants sur un de ces bancs publiques, un de ces bancs vert. " Soudain, alors que je me tournais pour me protéger d'une bourrasque de vent, je la vis et restais immobile, fasciné, impressionné.

Elle semblait glisser sur la neige tant sa démarche était gracieuse, souple, angélique. Elle gambadait sur ce chemin vide avec une élégance que personne, dont je me souvins, ne pouvait égaler, tant par la beauté que par la facilité. Ses mouvements étaient si rapides et si bien coordonnés que j'avais peine à les suivre. Sa chevelure blonde dansait autour d'elle, semblable à mille flammes, formant une auréole dorée qui illuminait sa charmante ligne et en faisait ressortir un peu plus toutes les grâces.

" Elle avançait vite, plus que vingt mètres, la peur s'installait en moi, plus que dix mètres, peur de déplaire, plus que cinq mètres, peur de voir son sourire se transformer en une si douce et si cruelle moue, elle me tracassait tant que si ma volonté de continuer à la contempler n'avait été si forte je me serait enfui me maudissant intérieurement. Mais, enfin, le temps sembla s'arrêter, elle passa, sa tête se détourna, me scruta, et alors que la peur me prenait au corps, un sourire tout simple mais si beau si frais que je crut en le voyant prendre un rhume de coeur, vint éclairer son doux visage­

" Depuis, je cherche, comme le prince avec la chaussure le pied, dans les yeux la lueur. Elle vous rend aveugle ou amoureux, rêve ou homme-chien, elle a cette façon de ne rien dire qui parle au goût des souvenirs, pour elle les mots sont sans valeurs, et l'amour aussi. Et pourtant je suis tombé en esclavage de ce sourire..."

Voilà. J'ai écrit une première approche maintenant il faut la décupler, lui donner de la valeur, de la force, de la vie...

Midi sonne, je m'arrête, je repousse la chaise et je m'assoie devant l'ordinateur : il faut que je fasse une recherche sur Baudelaire et sur ses fleurs du mal. Hier je les ai littéralement dévorées : ce poète était un véritable génie, je n'avais jamais lu rien d'une semblable beauté depuis le livre des Psaumes, jamais. Ce fut un véritable voyage dans le spleen et le désespoir :

Amer savoir celui que l'on tire du voyage, notre monde monotone et petit nous fait voir aujourd'hui, hier, demain notre image : une oasis d'horreur dans un désert d'ennui. Magnifique. »

            « Et le pire, c’est que je le pense. Comme quoi l’écrivain ne va pas chercher les références de ces personnages bien loin, » pensa-t-il.

« Midi et quart, mon regard rencontre la Bannière de la Troupe, je le détourne il se pose sur mon chut et en arrière-plan mon staff, je le réoriente et il se braque sur ma croix, des larmes me viennent alors que je m'écroule sur mon lit. »

            Shin para difficilement un coup de pied de Shô, dévia de justesse un jab de Chaps mais ne put esquiver son coup de point au corps. Une vive douleur se fit sentir dans le bas du ventre, sa vision se troubla et il sentit qu’il tombait en avant, dans un ultime effort, il ferma son poing droit et frappa au jugé, le coup prit Shô par surprise et le força à reculer.
 


 
 
posté le 14-06-2009 à 00:03:18

1 octobre...(3)

Lorsque la cloche sonna, la porte de la salle de cours s’ouvrit à la volée et, dans les ténèbres obscures de cette mâtiné d’orage, un corps se dessina, apparaissant bientôt à contre jour, illuminé par un éclair tombant sur les bâtiment de l’autre côté de la cour sur laquelle donnait les fenêtres du couloir.

« Yo, Shin-kun. 

_Senkami-san ? Que se passe-t-il ? 

_Tu es reçut et on commence la deuxième partie de l’entraînement, avec un deuxième professeur. »

Une ombre se détacha dans son dos et un étudiant de terminal se tint dans l’embrasure de la porte, de taille moyenne, cheveux châtain clair, yeux noisette et veste d’uniforme noire classique et sobre.

« Maître ? 

_Tu pourrais peut-être commencé à m’appeler par mon prénom, Shin, non ? 

_Si, bien sur, Charles. 

_Appel-moi Chaps. 

_Oui, Chaps. »

Charles – Chaps – Enscure, classé dans les dix meilleurs combattants du lycée au classement élargi – dans lequel Hans était au neuvième rang et Ronan au onzième – était l’ancien instructeur de Shin au club et sa cotte de popularité exprimait assez bien toute l’attention que la masse grouillante des élèves lui portait. Shin les suivit sur les toits pour entamer son nouvel entraînement. Pierce, Phoebe et Roman leur emboîtèrent le pas, suivit de Kate et d’Aspidistra, au moment de sortir, cette dernière remarqua que James n’avait pas bougé de sa place.

« Il ne viendra pas, » lui dit Kate, « il essaye d’écrire une nouvelle, il voulait être au calme. »

Aspidistra acquiesça puis elles accélérèrent pour rattraper les autres.

James fixait son stylo et sa feuille. Sur celle-ci, de sa longue et fine écriture, des lignes étaient inscrites à l’encre noire : les premières de sa nouvelle. Il les relut silencieusement et, dans son esprit, en lettres de feux, les mots se gravaient à mesure qu’il en endurait le sens :

« Neuf heures, le soleil inonde ma chambre, je suis seul, toujours seul je ne veux pas me lever - pour faire quoi ? rien - alors autant le faire couché.

Neuf heure et demie, je ne suis qu'une coquille vide qui lutte misérablement dans un océan de pleurs et de malheur : la vie.

Dix heure, mon téléphone sonne, je ne veux pas décrocher, je veux qu'on me laisse tranquille, je veux recommencer mon existence, je décroche néanmoins; c'est Loup. Il me propose de venir à la fête qu'il organise dans deux jours, mercredi. Il ajoute qu'il a invité également Boris, Ivan et Chaps, sa soeur Florence a prié Nadjejda et Violaine. Nadjejda, en russe c'est l'espérance, en amour ça veut dire absence, souffrance, supplice, silence, patience, persévérance, elle veut devenir nonne au grand désespoir du lycée dont elle est l'un des plus bel ornement, l'un des plus courtisé; aussi, mais même Loup n'a pas pu la faire renaître à un monde que l'attente de l'amour, dont elle diserte d'ailleurs, lui cache. Violaine, mon coeur se serre : nous allons encore, comme toujours, nous « accrocher » l'un à l'autre. Il suffit de nous placer dans la même pièce pour obtenir un dialogue assez ressemblant à celui que doivent tenir le diable - moi - et le bon Dieu - elle - lorsqu'il se rencontre. Et pourtant...

Dix heure et demie, tiré de mes pensées vagabondes par un appel aussi important et essentiel que naturel, je me lève : rien ne résiste à l'appel du ventre. »

            Il manquait quelque chose. Le personnage restait flou, invisible à l’œil du lecteur, et cette absence rendait le début inintéressant et long, il devait modifier cette impression dans les lignes suivantes. Il leva les yeux puis les arrêta sur deux élèves de la classe. « Bien, » pensa-t-il, « les choses sérieuses allaient pouvoir commencer. » Tel un serpent sa main fendit l’air, attrapa son stylo puis en fit courir la plume sur le papier :

« Onze heure, je m'assois à ma table, mon stylo est devant moi posé sur un cahier A5 vert. Je dois pour un vague concours au lycée -je dis « vague » car je n'ai pas tout à fait compris comment ils allaient nous départager - écrire une nouvelle. Dans d'autres circonstances et si le sujet m'avait davantage inspiré, ceci n'aurait été qu'un détail insignifiant à côté de mes oraux blancs de français de la rentrée. Mais si les oraux semblent se présenter sous un angle plus que rassurant, le concours, lui... - je tiens cependant à signaler le fait que je ne cherche pas la victoire, je préfère la laisser à un élève de S, de L ou même d'ES comme moi, tant que je n'ai pas à en souffrir les palmes, les félicitations et les réprimandes de mon ancienne professeur de français qui n'a jamais pu me supporter - je reconnais que ce sentiment était réciproque. Pour en revenir au concours, le principal blocage qui s'opère en moi est le thème abordé : la rencontre, j'y arriverai malgré tout, du moins j'ose l'espérer. Déjà, dans mon esprit, je le rencontre, je l'imagine, mon héros : grand, maigre, un crâne étroit, des pommettes saillantes, sensuel, vaniteux, hautain, presque violent, il n'éprouve que peu de compassion et de pitié et pour ainsi dire pas de scrupules et de remords; tiens mais c'est Vlad. Lui aussi pense, il rêve couché sur son lit à son personnage, il le voit de taille moyenne, trapu, les cheveux noirs tirant sur le châtain, des sourcils protubérants la barbe naissante, les yeux noisette, le nez "cyranesque", caractérisé par un humour minable, par une incapacité proverbiale à chanter juste, un sens de l`honneur développé, une faculté à se remettre en cause qui tient de la psychorigidité et les aptitudes nécessaires pour passer auprès des personnes de son lycée pour un catholique pratiquant, un républicain libéral, un scout "facho", un hérétique, un hippy, un nazi, un communiste, un social-démocrate centriste, un royaliste, un anarchiste, un étranger, un "salaud de français", un vichyste, un gaulliste et enfin un futur professeur d'histoire à tendance anti-clérical et politicien à ses heures : bref tout moi... »
 


 
 
 

Ajouter un commentaire

Pseudo : Réserve ton pseudo ici
Email :
Site :
Commentaire :

Smileys

 
 
 
Rappel article